Qu’est-ce que le programme Arctic Floating University ?
Ce programme consiste en une expédition d’environ un mois dans l’océan Arctique, plus précisément dans la mer de Barents, à bord d’un navire russe spécialement dédié à la recherche. Le but est d’étudier les impacts du changement climatique dans cette région particulièrement vulnérable. Ce qui est intéressant, c’est que ce programme est interdisciplinaire et réunit des étudiants, professeurs et chercheurs de différents horizons et venus du monde entier. Depuis quelques années, la « team Suisse » a rejoint l’expédition et travaille sur plusieurs projets tels que les zooplanctons, les microplastiques ou encore l’océanographie physique. Il y a aussi une équipe en communication qui met par exemple à jour le site uniartic.ch.
Y a-t-il une préparation spécifique ?
Oui, avant le départ nous avons dû dans un premier temps suivre des workshops sur les enjeux en Arctique, des ateliers de culture russe, de team building, et des cours relatifs à nos projets (océanographie, biodiversité, changements climatiques, etc). Nous avons aussi dû tester l’équipement nécessaire aux échantillonnages (seringues, machines, etc) et aux analyses (par exemple microscope) et nous préparer aux méthodes de collecte des données. Mon équipe (nous étions 2 par projet) est par exemple allée s’entraîner au préalable sur un lac.
Pourquoi aller en Arctique pour étudier le changement climatique ?
La région arctique se situe au pôle Nord et est constituée principalement d’un océan entouré de terres. La température de l’air en Arctique se réchauffe plus de 2 fois plus vite que la moyenne mondiale, entraînant la fonte des glaces, de la neige et du permafrost (sol qui est gelé toute l’année). Cela engendre des modifications dans les processus de distribution d’énergie à la surface de la Terre notamment car la neige et la glace réfractent les rayons solaires et les renvoient vers l’atmosphère grâce à leur couleur blanche. Lorsque la neige et la glace fondent, les rayons solaires ne sont plus aussi bien réfléchis et l’énergie reste à la surface de la Terre, ce qui accentue le réchauffement. Ces changements affectent aussi la circulation océanique, la végétation, la biodiversité et bien sûr les Hommes qui vivent dans ces régions.
Quel était ton projet à bord ?
La recherche de mon équipe portait sur les échanges de dioxyde de carbone (CO2) et de méthane (CH4) entre l’océan et l’atmosphère. En effet, l’océan arctique est un puits de dioxyde de carbone et une source de méthane, deux gaz à effet de serre qui renforcent le réchauffement lorsqu’ils sont présents dans l’atmosphère. L’objectif est d’examiner et de calculer les flux de gaz à la surface de l’océan, et de localiser les puits et les sources les plus importants. Les données récoltées servent aussi à observer s’il y a des changements dans le temps de la concentration de ces gaz dans la mer de Barents.
Qu’est-ce que le méthane et pourquoi s’intéresser à ce gaz ?
Le méthane est un gaz disponible naturellement et composé de quatre atomes d’hydrogène et d’un atome de carbone. Il se produit naturellement dans des milieux pauvres en oxygène, par exemple dans les sédiments des lacs et des océans. En Arctique on le trouve aussi sous forme d’hydrates (molécules d'eau formant des cages qui piègent des molécules de gaz), très sensibles aux changements de température. C’est un gaz à effet de serre moins connu que le dioxyde de carbone mais beaucoup plus puissant ! Sa concentration ne cesse d’augmenter dans l’atmosphère à cause de l’activité humaine et on estime qu’il est responsable de 20 % de l’effet de serre depuis 1750. En effet, il est 85 fois plus puissant que le dioxyde de carbone sur une période d’environ 10 ans, ce qui correspond à son temps de résidence dans l’atmosphère. Donc même s’il est présent en moins grande quantité que le dioxyde de carbone, son potentiel à augmenter l’effet de serre est beaucoup plus important.